Traduit de l’Allemand par Raphaël Koenig
ISBN 9782960155952. 213 pages. 23 €. Mai 2016







LESABÉNDIO

Paul Scheerbart

Le ciel était violet, et vertes les étoiles ; le Soleil aussi était vert.

Situé à bonne distance de la Terre, entre Mars et Jupiter, l’astéroïde Pallas (qui existe bel et bien, vous pouvez vérifier) est peuplé d’êtres étranges : le corps caoutchouteux, munis d’une ventouse et d’yeux télescopiques, les Pallasiens se nourrissent de champignons via leur épiderme, se déplacent grâce à un système de rubans-roulants et fument de « l’herbe à bulles ». Paisible jusque-là, leur vie se voit bouleversée par le projet d’un visionnaire nommé Lesabéndio. Pour percer le nuage qui entoure leur astre, leur apportant la lumière mais en leur occultant l’au-delà, le Pallasien envisage la construction d’une immense tour. L’érection de celle-ci aura des conséquences insoupçonnées

S’il nous était donné de résoudre toutes les énigmes, nous n’aurions plus rien à faire, et nulle part où aller.

Y aura-t-il suffisamment d’acier pour pouvoir bâtir l’immense édifice? Celui-ci ne risque t-il pas de défigurer l’astéroïde? Le jeu (la connaissance de ses propres causes) vaut-elle la chandelle (la possibilité de voir modifiée l’orbite de Pallas)? Le but glorieux projeté légitime t-il le rassemblement d’autant de forces individuelles? La douleur peut-elle être parfois souhaitable? Savoir justifie t-il tant de risques? La force d’une utopie ne s’épuise t’elle pas dans le désir de la concrétiser? Véritable et original roman de science-fiction, à la fois fable écologique et utopique, explorant avec acuité et facétie les accords et désaccords de la technique et de l’esthétique, de la raison et de la mystique, questionnant la place de l’individu dans tout processus collectif, dénouant les fils de nos désirs les plus démesurés et de nos peurs les plus tenaces, Lesabéndio, le chef-d’œuvre de Paul Scheerbart demeure l’une des grandes œuvres prophétiques de notre temps.

Notre existence sur Pallas est elle-même si étonnante, que nous pouvons raisonnablement espérer être les témoins de prodiges plus grands encore.



Paul Scheerbart, né en 1863 à Danzig, fut illustrateur, dessinateur, écrivain, inventeur, poète. Auteur d’une oeuvre prolifique qui resta incomprise de son vivant, il fut encore probablement jugé trop visionnaire pour ne pas sombrer dans l’oubli après sa mort en 1915. Antimilitariste convaincu et fin observateur de son temps il put y déceler les germes des terreurs qui endeuillèrent le vingtième siècle. Encensée par Gershom Scholem, par Alfred Kubin – qui illustra magnifiquement Lesabéndio – ou par Walter Benjamin, son oeuvre phare – écrite à l’aube de la Grande Guerre – est d’autant plus urgente à re-découvrir aujourd’hui que s’y déploie l’éventail de nos questionnements les plus contemporains.